Separazione delle carriere e diritti dei cittadini

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  1. L’histoire de l’organisation judiciaire italienne et l’engagement concret et quotidien de ses magistrats pour le soutien des valeurs constitutionnelles de l’tat social de droit n’ont pas t ignors par les autres magistrats europens.
    L’histoire de votre lutte et vos contributions thoriques ont constitu une source pour nos tudes et notre rflexion. Votre exemple reprsente un stimulant pour tous ceux qui ont de la justice une ide dmocratique.
    Dès lors, il n’est pas trange que la menace d’une nouvelle altration importante de l’organisation judiciaire italienne provoque immdiatement l’attention des magistrats des autres payes.
    C’est pourquoi le projet de sparation des carrières de la magistrature italienne en deux corps distincts -juges et parquet-- suscite notre intrÃÂ't mais aussi notre proccupation.
    Ce projet interpelle particulièrement les magistrats portugais qui vivent l’exprience de cette mÃÂ'me sparation depuis plus de vingt ans

  2. La question du rôle du Ministère Public ne peut pas ÃÂ'tre dissocie de la problmatique des fonctions attribues aux autres organes du pouvoir judiciaire et, en particulier, aux tribunaux. Le pouvoir judiciaire est constitu par un complexe d’organes, dont, dans beaucoup de systèmes europens, la magistrature du ministère public fait constitutionnellement partie.
    Dans ce contexte, le dbat sur la fonction finale et primordiale du Ministère Public va ncessairement se rpercuter sur l’analyse concrète des missions spcifiques que les Constitutions ou les lois attribuent au ministère public, missions qui, en dernière analyse, sont aussi attribues aux tribunaux, dans le contexte des fonctions rserves à l’État.
    La dfense de la lgalit dmocratique se traduit dans la pliade de fonctions exiges du Ministère Public, fonctions qui ne reprsentent rien d’autre qu’une concrtisation de cette mission de dfense de la lgalit par la magistrature.

    La dfense de la lgalit dmocratique se traduit aussi par l’exercice de l’action pnale, une mission plus spcifiquement confie au Ministère Public.
    Cependant, le concept moderne d’un tat de droit dmocratique et social impose que l’ide d’galit que le Ministère public doit dfendre devra tendre à dpasser une conception formelle de l’galit, de sorte que celle-ci puisse s’incarner dans une relle possibilit de jouir de leurs droits pour les citoyens, tant considrs individuellement qu’envisags comme corps politique librement organis et dtenteur de la souverainet de l’Etat.
    La Dclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 affirme, en son article 1, que les hommes naissent libres et gaux.
    Une telle proclamation doit ÃÂ'tre entendue aujourd’hui comme l’affirmation d’une possibilit et d’une capacit dont il revient à chaque socit et à chacun de nous de la raliser dans le concret. Pour que cette affirmation ne reste pas utopique, il faut suivre un chemin long et ardu visant à perfectionner les institutions qui organisent notre vie collective. Au-delà des principes, il revient à chaque humain, dans le cours concret de sa vie et dans la mesure de ses moyens, ventuellement coaliss, de lutter, rencontrer et actionner les instruments lgaux permettant de donner à cette affirmation une ralit.
    Nous pouvons donc dès à prsent tablir une diffrence entre une fonction gnrale de dfense de l’galit et les fonctions concrètes de l’galit, qui impliquent de rtablir l’galit potentielle (si ncessaire en compensant les ingalits, naturelles ou sociales, constates entre certaines catgories de citoyens). Cette dernière fonction, en beaucoup de systèmes, est, aussi, attribue statutairement et lgalement au Ministère public.
    Bien que dans des acceptions diffrentes, chaque fois que l’on parle de la vocation du Ministère Public en tant qu’organe de justice, surgit l’ide d’une magistrature jouant un rôle moteur dans la dfense de l’galit, ide fondamentale lgitimant l’existence du ministère public comme institution indpendante insre dans l’ordre judiciaire.

    L’ide d’un instrument institutionnel de l’galit des citoyens devant la loi constitue le fondement de l’existence du Ministère Public et, dans cette mesure, cette ide contribue aussi à l’indpendance des tribunaux, organes de souverainet.
    Cela signifie que le tribunal, dans sa fonction de rprimer les violations de la lgalit ou de rgler les conflits, grâce à l’action du Ministère Public, agit non pas en tant que reprsentant d’une partie mais en dfenseur du principe d’galit contenu dans la loi, mÃÂ'me si les plus faibles, victimes de la violation de la loi, n’intentent pas eux-mÃÂ'mes une action.
    C’est cette ide d’galit qu’il faut soutenir en toutes circonstances.
    C’est cette ide galitaire de justice qu’une vision no-librale du système judiciaire essaye de mettre en cause, au nom d’une prtendue efficacit, «efficacitÃ‚» qui, en tout cas, n’quivaut pas à l’effectivit des droits pour tous les citoyens.
    C’est cette conception de Ministère Public qu’on veut dtruire ou, au moins, restreindre.

  3. Au Portugal, la division des carrières a t mise en place à l’occasion des rformes de l’organisation judiciaire imposes par la dmocratisation de l’Etat après la Rvolution d’Avril1974.
    Le prtexte de cette sparation tait la ncessit de contrer l’influence que le gouvernement exerçait sur les tribunaux et sur les juges en utilisant l’action du parquet.
    Rapidement on a constat que la sparation des carrières des magistratures ne suffisait pas pour que l’action du Ministère Public cesse d’ÃÂ'tre dterminante dans le travail des tribunaux.
    On en a conclu que seule l’autonomie du parquet vis-à-vis du pouvoir politique pourrait viter l’influence de l’excutif sur le pouvoir judiciaire.
    En consquence, cette autonomie a t consacre dans la constitution ainsi que le principe de la lgalit de poursuite.
    On aurait pu croire que les conditions ncessaires à un fonctionnement correct et quilibr du système taient runies et que l’on pourrait ainsi garantir les droits des citoyens et l’indpendance des institutions judiciaires.

    Pourtant, les espoirs furent dÃƒÂ§us.

  4. 4. Quand le Ministère Public, vers la fin des annes 80 et le dbut des annes 90, a commenc à dvelopper, pour la première fois au Portugal, une activit judiciaire indpendante et capable de mettre en question la traditionnelle impunit des dtenteurs du pouvoir politique et conomique, immdiatement des voix se sont leves pour mettre en doute la lgitimit dmocratique du parquet.
    La vraie nature de cet organe au sein du pouvoir judiciaire, la possibilit des titulaires des enquÃÂ'tes de donner des directives à la police criminelle, y compris dans l’enceinte du procès, enfin la possibilit mÃÂ'me de l’action autonome du parquet, ont t mises en cause.
    Dans les derniers temps, des thories rvisionnistes ont surgi au sein de la doctrine, pourtant clairement favorable depuis la Constitution de 1976 à la nature judiciaire du parquet et à l’appartenance de celui-ci à l’ordre judiciaire,
    Certains ont mis en doute l’ide que le parquet puisse ÃÂ'tre conçu comme une vraie magistrature, parallèle à celle des juges, comme le dit la loi.
    On a redcouvert ensuite, malgr la conscration constitutionnelle du principe de lgalit des poursuites, de vieilles conceptions au sujet du rôle du parquet comme instrument d’une politique criminelle inexistante. Tout cela en diffusant l’ide que la perte d’efficacit de la justice pnale serait une rsultante directe de la rupture des liens du gouvernement avec le Ministère Public.
    On a commenc aussi à soutenir que le Ministère Public serait un organe administratif et non judiciaire, ceci contre le texte et l’agencement de la constitution. En effet, le statut du parquet portugais est inclus dans un titre de la constitution ddi aux tribunaux et est plac dans un chapitre qui suit immdiatement celui qui aborde le statut des juges et prcède celui qui règle la cour constitutionnelle.
    On s’est pench galement sur la doctrine du procès pnal, en dfendant l’ide d’un parquet comme une partie parmi d’autres parties, y-compris dans la phase de l’enquÃÂ'te.
    Rcemment, certains ont mÃÂ'me os remettre en cause le pouvoir du parquet de conduire et de dcider la fin d’une enquÃÂ'te. Un projet avort de rforme du code a fait la suggestion de crer une phase contradictoire runissant le Ministère Public, l’inculp et la victime pour discuter du moment exact de la fin des investigations.
    Et ça, quand on a djà, comme en Italie, la possibilit de recours au GIP pour vrifier si la dcision du parquet de classer ou accuser est correcte ou non.

    N.B. Je ne comprends pas exactement cette dernière phrase. Que signifie GIP ? Je suppose qu’il s’agit d’une phase judiciaire (chez nous, chambre du conseil, qui dcide de renvoyer ou non l’affaire devant un juge correctionnel ?. Merci d’utiliser le mot portugais en entier (et, si possible italien, si tu le connais).
    Finalement, certains se font faits les chantres de l’admissibilit d’initiatives prives et parallèles de recherche des preuves.
    À ce point, on est très près de dpasser la frontière d’un modèle de privatisation de l’enquÃÂ'te, du procès pnal et de la justice pnale.
    D’autre part, les opinion mackers de la droite insistent, avec l’appui des avocats ou, mieux dit, en appui des avocats – trop nombreux au Portugal comme en Italie - dans la rduction du champ d’intervention du parquet en-dehors de la juridiction pnale proprement dite.
    N.B. Cette explication n’est-elle pas un peu faible ou tout au moins insuffisante ? Il y a des intrÃÂ'ts internes aux professions juridiques, certes mais aussi un courant no-libral de fond et des intrÃÂ'ts des milieux qui « font » de l’argent (entreprises d’une certaine dimension…)
    Toutefois, dans un pays qui a encore une culture limite des droits et la citoyennet, o la crise conomique et les difficults des couches les plus faibles de la population augmentent tous les jours, et o le Ministère Public a jou, traditionnellement, un rôle assez important dans la dfense directe des droits des secteurs sociaux moins bien protgs, cette tentative d’annuler l’intervention sociale du parquet et de privatiser ses services met en cause la protection effective des droits des citoyens dfavoriss.
    Reste à voir comment notre trange gauche rsistera, en temps de rvision constitutionnelle, au chant de la sirène no-librale.
    Je suis, en tout cas, convaincu que seule la capacit effective des magistrats du parquet d’assurer une action attentive et opportune dans tous ces domaines, et en consquence, l’appui social qui devrait en rsulter, peut empÃÂ'cher la destruction de notre modèle de justice.
    Il est vrai que, dans certains domaines, le parquet n’a pas veill à la reconnaissance sociale de son travail, soit parce qu’il est, en ralit, effectivement faible, soit parce que, du point de vue mdiatique, on n’a pas russi à dvelopper une politique correcte de sensibilisation des citoyens.
    Ce n’est pas un hasard si, jusqu’à prsent, seules les centrales syndicales ont manifest son appui au maintien des pouvoirs fonctionnels du parquet dans la juridiction du travail. En effet, c’est dans cette juridiction l’engagement des magistrats dans l’appui concret aux droits des citoyens est le plus facilement visible.
    Un autre argument utilis par la doctrine de droite pour mettre en doute l’ide du parquet comme une vraie magistrature rsulte du fait que le Ministère Public portugais se voit confier, en parallèle, des fonctions d’avocat de l’Etat. Sur cet aspect, la doctrine n’a pas tort, mÃÂ'me si notre statut permet au procureur de demander le remplacement du magistrat du parquet par un avocat (au sens habituel), chaque fois que l’on est confront à une incompatibilit potentielle des valeurs à dfendre. Cela arrive frquemment, surtout dans les affaires d’accidents de la route, lorsque le Ministère Public accuse, devant la cour criminelle, le conducteur d’une voiture appartenant à l’Etat considr responsable d’un accident. Il y aurait videmment incompatibilit à cder à la demande de l’administration publique quand elle sollicite du parquet la dfense de sa position devant la cour civile ou pnale.
    C’est prcisment à cause de cette ambiguït que le Syndicat des Magistrats du Ministère Public du Portugal a toujours lutt pour supprimer cette trange comptence du statut du parquet, malheureusement sans succès,
    En ralit, un tel système n’existe à ce jour qu’en Uruguay.

  5. Avant tout, il faut comprendre les facteurs qui ont permis à cette tendance de remporter un certain succès.

    Cette volution ngative a t possible, ou tout au mois facilite - car la sparation des corps de magistrats a produit une division dans la culture professionnelle des magistrats du parquet et des juges.

    On n’a pas russi à assurer le dveloppement d’une culture judiciaire commune bien que la formation des juges et des magistrats du parquet continue d’ÃÂ'tre organise dans une mÃÂ'me cole et bien qu’une phase commune d’tudes et de stage se maintienne.
    On a perdu, je crois, au sein des deux corps de la magistrature, le vrais sens de la juridiction.
    Dans certains cas, les membres du parquet ont dvelopp une tendance pratique à sur-valoriser les objectifs de scurit au dtriment des valeurs de la justice. De leur côt, les juges ont choisi une attitude plutôt formaliste, ce que les conduit, parfois, à une position de simples arbitres, mÃÂ'me dans les cas o la loi prvoit et exige une intervention directe et engage du juge dans la ralisation de la justice matrielle.
    De ce point de vue, l’intention de renforcer les garanties des citoyens devant la loi, qui tait à l’origine de la division des carrières, a t dtruite dans la mesure o division a appliqu, de manière mcanique, la ncessaire sparation des fonctions au sein du procès à la division organique des corps des magistrats, en faisant une division stricte.
    Cette division stricte a produit des tendances culturelles et des visions sociologiques diffrentes à propos du but essentiel des activits des juges et des magistrats de parquet, ce qui constitue un obstacle à une vision dialectique et quilibre des valeurs en cause dans la procdure.
    Cette diffrence de perspectives a produit finalement un blocage de l’efficacit du procès pnal.
    Le mÃÂ'me phnomène s’observe aussi, bien que dans d’autres mesures, dans les autres juridictions.
    Parallèlement, on a vu se dvelopper un ensemble de prjugs corporatistes et une guerre aveugle entre juges, membres du parquet et avocats. Ces dveloppements menacent le sens final de l’action du système judiciaire, sens final qui peut se rsumer dans le devoir d’aider à concrtiser dans la pratique les droits des citoyens.

  6. Ce sont ces rflexions et cette exprience que je veux partager avec vous, car je crois qu’elles peuvent ÃÂ'tre importantes pour que vous apporter une perception largie des risques que comportent, pour la justice et la dfense des droits des citoyens, pense dfectueuse ou mal intentionne concernant la sparation de carrières entre magistrats.
09 10 2003
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